Publié le 31 Mai 2018
LES AMIS DU BARRAGE
Association loi 1901 N° W501000490
3, Résidence des Vallons
50600 St HILAIRE DU HARCOUET
lessamisdubarrage@gmail.com
Le 1er JUIN 2018
Monsieur Emmanuel MACRON
Président de la République
Palais de L’Elysée
55, Rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 PARIS
Objet :
La destruction programmée des Barrages de la Sélune
Monsieur le Président de la République,
L’association Les Amis Du Barrage a été créée en 1993. Elle compte aujourd’hui un peu plus de quatre cents membres actifs et huit mille cinq cents sympathisants.
La décision de supprimer les lacs et les barrages de la Sélune nous a été annoncée par plusieurs gouvernements successifs depuis Novembre 2009.
Bien que contestée à juste titre par l’ensemble des élus et l’immense majorité de la population concernée, elle a été à chaque fois présentée comme définitive et irréversible.
Les raisons invoquées seraient le rétablissement de la continuité écologique et de la qualité de l’eau, auxquelles s’ajoutent depuis peu des allégations selon lesquelles la production des deux usines hydroélectriques serait déficitaire. Un groupe privé s’était pourtant porté candidat à l’exploitation des structures pour une ultime concession de trente ans. Plusieurs éléments de son projet avaient été validés par le ministère en charge de l’Environnement et de l’Energie.
Les barrages ne polluent pas mais leurs lacs servent de bassins de décantation et retiennent une partie de la pollution qui vient de l’amont. Les humains et les salmonidés profitent ainsi d’une eau de qualité correcte à l’aval. Prétendre que les migrateurs remonteraient le cours de la Sélune quand les barrages auront disparu serait parfaitement illusoire car les eaux souillées se déverseraient jusque dans la baie du Mont St Michel et les saumons ne dépasseraient sans doute pas l’embouchure du fleuve dont ils disparaîtraient totalement.
L’arasement immédiat des barrages entraînerait aussi la disparition de deux usines
hydroélectriques capables d’alimenter 15.000 personnes d’une énergie propre, renouvelable,
modulable, ainsi que la suppression d’une réserve d’eau de 20 millions de mètres cube. La
seule de la région.
L’effet retardateur et modérateur des deux ouvrages sur les conséquences des crues du fleuve
n’est plus à démontrer.
Le coût exorbitant de la démolition des barrages et de la « renaturation » de la vallée
dépasserait à la fois l’entendement, les moyens de l’Etat et ceux des collectivités territoriales
incapables de supporter la charge des investissements nécessaires, de leur fonctionnement et
de l’entretien des structures à créer.
La raison voudrait que faute de moyens techniques et financiers suffisants ainsi que de
l’expérience et des compétences indispensables, l’Etat reporte la mise en oeuvre d’un projet
dont ni l’utilité ni l’urgence n’a été démontrée.
L’analyse de ces arguments de bon sens avait conduit Madame Ségolène ROYAL, alors
Ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, à prendre une
décision de nature à satisfaire la quasi-totalité des protagonistes tout en ramenant la
sérénité dans une vallée soucieuse de son avenir tant environnemental qu’économique.
L’arrêté préfectoral du 3 Mars 2016 qui en résulte (Et qui est toujours en vigueur) prévoit la
vidange nécessaire de la seule retenue de Vezins. Une fois l’assec réalisé, des expertises
menées sur l’ensemble des installations, une décision basée sur les rapports d’experts serait
finalement prise.
Si l’état des structures est jugé à risque pour la sécurité et la poursuite de l’exploitation, on
s’orienterait vers une destruction de l’ouvrage.
Dans le cas contraire, une ultime concession de trente ans serait attribuée.
Cette période transitoire pourrait être mise à profit pour améliorer la qualité des eaux
provenant de l’amont et acquérir les moyens techniques et financiers susceptibles de
permettre la réalisation d’une opération « exemplaire aussi bien au plan technique,
environnemental que d'accompagnement des acteurs locaux ». C’était la promesse de l’Etat.
Il serait judicieux de mener, pendant ce temps, une réflexion sur les moyens de suppléer la
production d’énergie renouvelable, la réserve d’eau et de prévenir les risques d’inondation.
L’ensemble de la population concernée et ses élus attendait donc sereinement qu’une décision
basée sur des éléments pragmatiques soit prise dans l’intérêt général.
Mais c’était sans compter sur le communiqué de presse du 14 Novembre 2017 de
Monsieur Nicolas HULOT, Ministre de la Transition écologique et solidaire qui a semé
effroi et incompréhension sur la population du Sud-Manche. Possiblement mal informé
par une démarche parlementaire malheureuse et irresponsable, il a décidé, unilatéralement et
sans concertation, la démolition immédiate des ouvrages de Vezins et La Roche Qui Boit,
sans même expliquer les raisons de cette volte-face étatique.
Outre la stupéfaction, cette décision a eu pour effet de raviver les tensions et de réinstaurer
une situation conflictuelle alors que les esprits s’étaient enfin apaisés.
Nous avons écrit à Monsieur HULOT pour lui demander de revenir sur sa décision. Il
nous a fait répondre par sa Cheffe de Cabinet que Monsieur le Préfet de la Manche nous
expliquerait les modalités et le calendrier de l’arasement des barrages de la Sélune.
Nous avons adressé un courrier à Monsieur le Premier Ministre, co-signé par une bonne
cinquantaine d’élus (Conseillers Régionaux, Conseillers Départementaux, Maires,
Conseillers municipaux) et les associations qui nous soutiennent. Le Chef de Cabinet de
Monsieur PHILIPPE nous répond l’avoir transmis à Monsieur le Préfet de la Manche pour
qu’il en « prescrive l’examen ».
Ces deux réponses lapidaires sont particulièrement mal perçues par l’ensemble de nos
membres et de nos soutiens.
Depuis 2010, l’association Les Amis du Barrage a adressé de très nombreux courriers aux
Présidents de la République, Premiers ministres, ministres et personnalités diverses. Chacune
d’entre elles a presque chaque fois répondu personnellement et signé de son nom, ajoutant
parfois quelques mots manuscrits. La teneur des courriers n’était pas toujours conforme à nos
attentes, mais ils étaient motivés, argumentés, et respectueux de l’expression populaire.
Nous ne comprenons pas cette rigidité et ce refus de communiquer avec une population
préoccupée par le devenir de son environnement et que ce gouvernement engage brutalement
de manière irréversible pour au moins un siècle.
La raison voudrait que le processus initié par Madame ROYAL soit mené à son terme,
comme prévu, quelle que soit la décision finale qu’il en résulterait.
Nous vous serions donc reconnaissants de bien vouloir faire en sorte que l’exécution des
dispositions annoncées par Monsieur HULOT soient suspendue et que l’arrêté préfectoral de
2016 soit respecté.
Dans l’espoir que vous voudrez bien accéder à notre demande, nous sommes à votre
disposition et à celle de vos services pour vous fournir toute autre précision par tout moyen à
votre convenance.
Dans cette attente,
Veuillez croire, Monsieur le Président de la République, à l’expression de nos salutations
respectueuses.
John KANIOWSKY
Président
09 80 90 43 23
09 85 90 43 23
06 14 87 72 94