Projet d’effacement des barrages de Vezins et LRQB
Publié le 24 Mars 2014
Projet d’effacement des barrages de Vezins et LRQB
Consultation sur le projet de gestion sédimentaire (mars 2014)
Il est déclaré fort et haut que les barrages de Vezins et la Roche Qui Boit (LRQB) ont été construits dans
un objectif unique : produire de l’électricité. Cet objectif de base n’est pourtant pas incompatible avec des
usages annexes existants et reconnus :
- animation touristique autour des plans d’eau ainsi constitués : la base de la Mazure a
bénéficié de soutiens financiers de diverses origines accréditant ainsi un usage touristique,
- soutien à l’étiage en aval sur demande du Syndicat d’alimentation en eau potable Baie
Bocage soutenant ainsi l’importance de la réserve d’eau des 2 lacs, indispensable pour garantir
une production d’eau potable, dans un territoire dépourvu de ressources souterraines
conséquentes (l’utilisation des forages du SIAEP Baie Bocage a rapidement confirmé les limites
des prises d’eau souterraines)
- régulation du débit de la Sélune en aval des barrages, par une gestion raisonnée des
débits sortants. Les habitants de l’aval connaissent bien cet usage et confirment les bienfaits
indéniables sur la prévention des inondations. Alors que ces riverains de la Sélune ne sont même
pas consultés, négligeant ainsi la possibilité de recueillir leur avis de terrain indispensable à la
bonne compréhension de ce cours d’eau, cet usage est régulièrement contesté par les autorités.
Les habitants ont une parfaite appréciation des divers phénomènes ayant un impact fort sur le
débit de la Sélune (marées, vents, pluviométrie, orages, ..) et saisissent rapidement le
comportement à venir de la Sélune.
Dans leur utilisation raisonnée, ces trois usages n’ont jamais été préjudiciables à la fonction première des
barrages, à savoir la production hydro-électrique. Alors pourquoi vouloir nier sans cesse l’effet régulateur
des barrages ? Il va de soi que lors des crues importantes, avec inondation des habitations, tout le
monde sait que les barrages n’ont plus aucun effet : dans cette situation, ils sont effectivement
transparents.
Pourquoi persister à nier cette conséquence bénéfique de la présence des barrages avec une gestion
intelligence des débits et continuer à affirmer qu’ils ont aucun effet sur le débit de la Sélune, y compris en
cas de fortes pluviométries ? Il semblerait que cette position officielle, dans notre département, ne
correspond pas à ce qui se passe au barrage de Guerlédan où, en concertation avec les élus, les
autorités préfectorales locales conduisent la gestion des débits quand il y a nécessité.
Il faut distinguer l’inondation des terres de celle des maisons. Celle des terres est inévitable en
considération de la pente quasi nulle de la Sélune, avec un parcours très sinueux, à partir du Pavement
jusqu’aux villages Le Noyer/Les Verdières. Il faut ajouter à cette spécificité, l’influence majeure de la
moindre marée représentant alors un frein important au bon écoulement des eaux.
L’étude menée, à propos des inondations, est un véritable non-sens. Le titre du rapport « expertise sur le
rôle des barrages de la Sélune lors des crues » est révélateur de l’incompréhension totale sur la réalité
du terrain. La préoccupation, des habitants vivant à l’aval des barrages, ne porte pas sur le rôle des
barrages lors des crues mais bien sur leur rôle avant que la crue n’arrive et leur capacité à moduler
le débit de la Sélune par une gestion appropriée des lâchers. Il n’est pas demandé aux barrages de
corriger mais de prévenir la crue.
Le rapport d’expertise comportant quelques 251 pages, dont 135 ne contenant que des photocopies du
journal de bord d’EDF, ignore la partie aval des barrages. Devant la gravité du risque, l’absence d’une
véritable étude sur ce risque réel est affligeante. Peut-être révélerait-elle la véracité des affirmations que
nous rappelons sans cesse et sans être écoutés ?La présentation du projet de travaux, faite lors de la dernière réunion tenue dans les locaux de la Mazure,
est de nouveau « remarquable » : la démonstration des opérations déjà programmées, au fil de l’eau,
s’est soudainement arrêtée au barrage de la LRQB. La partie aval a été de nouveau totalement ignorée.
Le journal de l’opération confirme cet état de fait.
Nous nous trouvons devant un véritable déni du risque qui va surgir, en aval, avec la suppression
des barrages.
Le document proposé à la consultation de la population et intitulé « extraits de l’étude d’impact : choix et
justification du projet solutions de substitutions envisagées » confirme la position des services de l’état :
sur 31 pages, seules 21 lignes sont consacrées au risque inondation à l’aval (page 18). Là encore, c’est
un rapport de négation. Il est pourtant écrit : un barrage hydroélectrique ne joue un rôle d’écrêtement de
crue que pour les petites crues (au mieux inférieures à la centennale). C’est un aveu pertinent : si les
barrages ne jouent ce rôle d’écrêteur que pour les crues inférieures aux centennales, les populations s’en
satisferont.
Lors de la dernière réunion à la Mazure, les personnes présentes ont appris que la population était
invitée à participer à l’élaboration du projet de gestion sédimentaire, avec comme date butoir le 15 mars.
A ma question sur la communication à la population de cette possibilité, il a été répondu qu’elle sera
informée par le biais du journal de l’opération (numéro 3). A la date d’écriture de ces lignes, soit le 11
mars, le bulletin n’était toujours distribué à la population. Non seulement les études ne prennent pas en
compte la véritable mesure des risques d’inondation à venir, mais de plus il faut hélas constater que l’on
ne souhaite accorder aucune importance, ni même la moindre écoute, aux avis exprimés par les
populations locales. C’est une véritable mystification.
Les certitudes affirmées sur la capacité des services à bien gérer les quantités de sédiments concernés
par la vidange rappellent étrangement celles des années 90. Ce n’est pas rassurant.
La mise en place des merlons, qu’ils soient en travers ou en parallèle, pour stocker les sédiments ne
souffre, de la part de leurs concepteurs et défenseurs, d’aucun doute sur leur tenue dans le temps.
Non seulement les sédiments pollués représentent un risque de contamination de l’aval mais stockés, à
l’air libre et asséchés, un risque lié à l’inhalation ou l’ingestion de poussières riches en cadmium et
chrome. Ces sédiments sont doublement dangereux. Pour limiter le deuxième risque, ces sédiments
seront recouverts par d’autres sédiments extraits du reste de la retenue et indemnes de contamination.
En clair, il y a enfouissement des sédiments pollués : c’est une véritable décharge qui sera créée sur un
cours d’eau.
Si les sédiments pollués, au niveau de l’Yvrande, présentent un double risque, il est effarant de les laisser
sur place. C’est un risque majeur, pour les populations, les poissons et l’eau, qui doit absolument être pris
en compte. Ces sédiments doivent être retirés.
Quelque soient les précautions prises pour contenir les sédiments, une quantité sous-évaluée sera
inévitablement transférée en aval, avec un premier risque pour les frayères. Le NASF (North Atlantic
Salmon Fund), pourtant farouche partisan de la suppression des barrages, reste curieusement prudent
sur le devenir de la population des salmonidés, dans la Sélune. Dans une brochure dédiée aux barrages
de Vezins et de LRQB, le NASF suggère une pause dans la pêche au saumon et n’écarte pas la
possibilité de mettre en pratique une pêche sportive. Tous ces éléments font craindre le pire pour celui
qu’il était prévu de sauver : le saumon, et de le libérer des contraintes liées aux barrages pour pouvoir
remonter la Sélune, jusqu’à Saint-Cyr du Bailleul, sans doute.
Pour justifier l’arasement des barrages, les partisans de cette hérésie nous ont habitués aux volte-face.
Quand l’argumentaire relatif à la protection de la population des salmonidés fléchissait, les civelles
devenaient l’enjeu majeur (le quota français de pêche a été augmenté de 20% en 2013/2014), puis plus
tard les anguilles étaient mises à contribution.Certains pêcheurs découvriront, un peu tard, les méfaits engendrés par la suppression des barrages.
Lors de la dernière réunion à la Mazure, les pécheurs ont appris avec stupéfaction que l’accès aux
berges sera interdit pendant une période indécise et qu’ils ne pourront plus pratiquer leur activité de loisir
comme par le passé. Premières déconvenues.
A la page 6 du journal de l’opération, il est écrit : la solution retenue est de mettre à profit l’action
naturelle d’une rivière qui retrouve son lit pour les transporter (les sédiments) ……….. l’énergie du cours
d’eau permettra l’érosion des sédiments et leur transport vers l’aval, à proximité du pont des Biards.
Comme il est question de quantités importantes (dixit), comment peut-on laisser croire et affirmer
qu’aucune part de ces quantités transportées ne se retrouvera pas, plus en aval ?
L’étape 2 comprend une action pour le moins insensée : pour obtenir des résultats significatifs (érosion
des sédiments et transport en aval), il faudra maintenir une cote basse suffisamment longtemps pour
permettre la survenue de forts débits voire d’une ou plusieurs crues. Cette étape se déroulant en amont
du barrage de Vezins, comment peut-on parler de crues dans cette section de vallée ? La description de
cette action montre bien qu’il est espéré que la Sélune évacuera d’elle-même les sédiments en aval : il
suffira de bien lui expliquer où les déposer.
Les événements récents, inondations diverses et à répétition, ont hélas montré l’impuissance des
hommes à maitriser les éléments hydrauliques, la nature. Une fois de plus, nous retrouvons les certitudes
des services et autorités d’hier.
Quel avenir pour la vallée ? Lire en page 3 : la partie amont de la retenue de Vezins est difficile d’accès et
à la page 8 : la proximité du barrage de Vezins est difficilement accessible. Simple cours d’eau, la Sélune
deviendra discrète dans son fond de vallée et quid de la valorisation des paysages. L’annonce d’un plan
de mise en valeur environnementale, culturelle et économique de la vallée, depuis longtemps mis en
avant, attend toujours le moindre commencement d’explications, le moindre exemple et la moindre
démonstration de réussite pérenne.
Pour revenir sur le risque « inondation » : quelle pourra être la réponse des services de l’état, et quelles
solutions seront prises, s’il s’avère que les crues se multiplient et s’aggravent, comme nous le prévoyons,
en aval, après la suppression des barrages ?
Pourquoi une véritable analyse de ce risque n’est-elle toujours pas faite ? Pourquoi les habitants des
secteurs concernés (par exemple au Pavement à Poilley) n’ont-ils pas et ne sont pas consultés ? Il faut
qu’ils soient au moins écoutés.
Étude d'impact sur le risque inondation de la partie aval des barrages : sur ce risque, le manque de
prudence pourrait être considéré comme une faute, ce qui pourrait s'inscrire dans la continuité de la
jurisprudence du Conseil d'Etat et être conforté par l'incription du principe de précaution dans la Loi
Barnier.
Le Conseil d'Etat, dans un arrêt en date du 30 janvier 2012, rapelle que le principe de précaution, issu de
l'article 5 de la Charte de l'environnement, s'impose aux pouvoirs publics et aux autorités administratives
dans leurs domaines de compétence respectives.
Michel GÉRARD, Maire de Poilley 50
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